Bénévole de longue date à l’Hôpital Saint-Boniface, Joan Lachance ne s’attendait pas à y vivre un jour l’expérience des soins cardiaques comme patiente. Mais le destin en avait décidé autrement.
Cette femme de 61 ans qui vit à Winnipeg a commencé à faire du bénévolat à Saint-Boniface il y a plus de dix ans, après le décès de sa mère aux soins palliatifs de l’Hôpital. « Après son décès, j’ai voulu donner au suivant d’une manière ou d’une autre [pour les soins reçus] », explique Mme Lachance. « Le bénévolat m’en a fourni l’occasion. »
Qu’il s’agisse d’accueillir les patientes et patients et les visiteuses et visiteurs à l’entrée principale ou de distribuer des exemplaires gratuits du Winnipeg Free Press dans tout l’établissement, Mme Lachance s’est investie dans son rôle de bénévole à l’hôpital.
Elle s’est aussi consacrée à aider sa collectivité. « J’ai fait beaucoup de bénévolat dans le domaine de la ringuette pendant plus de 20 ans », déclare l’ancienne mère à temps plein de deux filles, aujourd’hui âgées de 30 et 34 ans.
L’hypertension artérielle a révélé un problème de santé
On ne s’étonnera pas d’apprendre que Mme Lachance et son époux, Don, étaient bénévoles pour le traîneau du Père Noël du Club Optimiste de Transcona un soir de décembre 2024.
« Don et moi étions en train de marquer l’itinéraire du traîneau pour le publier plus tard sur Facebook », explique-t-elle. « Nous sommes rentrés à la maison et j’ai ressenti un malaise. Je n’avais aucune douleur à la poitrine, mais je ne me sentais pas bien. Je ne peux pas le décrire, sauf pour dire que mon cœur battait trop vite et que j’avais le souffle court. Il m’a semblé que quelque chose n’allait pas. »
Mme Lachance dispose d’un tensiomètre à la maison et a donc pris sa tension. « La pression artérielle était de 200 sur 98, ce qui est élevé », relate-t-elle. Elle s’est remise d’un accident vasculaire cérébral à l’âge de 39 ans et se montre prudente au sujet de sa santé.
Pourtant, elle avait des doutes. « Ma première pensée a été de me dire : “Je sais que le service des urgences est très occupé. Est-ce que j’ai envie d’y aller et de leur faire perdre leur temps si je ne suis pas malade?” Pour moi, il n’y avait pas encore d’urgence », dit-elle. Finalement, Don et elle ont décidé d’y aller malgré tout.
À l’Hôpital Saint-Boniface, elle a subi une analyse sanguine pour vérifier son taux de troponine, une protéine qui signale des dommages au muscle cardiaque. Le taux était élevé. « Alors qu’un taux normal est de 14 ou moins, le mien était d’environ 35 », explique-t-elle. Pendant les trois heures qui ont suivi, elle a attendu à l’urgence, jusqu’à ce qu’une autre analyse sanguine révèle que sa troponine avait grimpé à 300.
Le médecin de garde a admis Mme Lachance au service de cardiologie et l’a inscrite pour une angiographie le lendemain, l’ajoutant ainsi aux quelque 47 000 visites de patientes et patients effectuées chaque année dans le cadre du programme de sciences cardiaques de l’hôpital. Elle est restée à Saint-Boniface pendant quatre nuits.
L’angiographie a montré que Mme Lachance n’avait pas de blocage, ce qui était une bonne chose, mais aussi qu’elle avait subi une crise cardiaque due à une dissection spontanée de l’artère coronaire (DSAC). La DSAC est une affection caractérisée par la formation d’une petite déchirure dans la paroi d’une artère du cœur. Elle peut entraîner des problèmes de circulation sanguine, une crise cardiaque, des anomalies du rythme cardiaque, voire la mort.
« Dans mon cas, la DSAC était une petite déchirure, un peu comme une ecchymose, dans mon artère », précise-t-elle. « Le sang circule dans l’artère, mais il se heurte chaque fois à cette ecchymose. Il faut donc du temps pour qu’elle guérisse d’elle-même. » Elle n’a pas eu besoin d’être opérée.
Une deuxième DSAC en janvier 2025
Selon différentes études, jusqu’à 90 % des cas de DSAC concernent des femmes. La recherche a démontré que cette maladie est fréquente chez les femmes de moins de 50 ans, par ailleurs en bonne santé, et qu’elle peut également survenir pendant la grossesse. Cependant, les connaissances scientifiques sur les maladies cardiaques chez les femmes sont encore très lacunaires par rapport à celles qui affectent les hommes. Le service de recherche de l’Hôpital Saint-Boniface s’efforce de combler cette lacune en mettant sur pied le premier programme de recherche sur la santé cardiaque des femmes au Manitoba, grâce au soutien de donatrices et de donateurs.
La DSAC peut être causée par des émotions fortes ou un stress intense, des déclencheurs physiques comme l’entraînement en résistance et à haute intensité et la course de fond, des complications de la grossesse, des déclencheurs hormonaux, des prédispositions génétiques, et une maladie appelée dysplasie fibro-musculaire.
De retour à Saint-Boniface, on lui a donné des médicaments pour sa tension artérielle et on l’a renvoyée chez elle le 22 décembre, juste à temps pour Noël. Elle avait rendez-vous avec la Dre Shuangbo Liu, cardiologue d’intervention et clinicienne-chercheuse à Saint-Boniface, spécialiste de la santé cardiaque des femmes.
Cependant, aux premières heures de la nouvelle année, Mme Lachance a ressenti une douleur à la poitrine. Elle est retournée au service des urgences de Saint-Boniface.
Le médecin qui l’a vue a pensé qu’il s’agissait d’une autre DSAC. « Mais à cause de cela, ils ont préféré ne pas faire une autre angiographie pour le confirmer, parce que le fil fin aurait pu aggraver la déchirure par accident », indique-t-elle. Elle a passé quatre autres nuits à Saint-Boniface, repartant avec un peu plus de médicaments.
La Dre Shuangbo Liu a expliqué à Mme Lachance qu’elle n’aurait pas été traitée différemment avec la deuxième DSAC, peu importe ce qu’une angiographie aurait pu révéler. Elle lui a dit qu’environ 20 % des personnes atteintes de DSAC peuvent en subir plus d’une, relativement proche l’une de l’autre.
La guérison et le retour au bénévolat à Saint-Boniface
Aujourd’hui, Mme Lachance vit toujours avec une douleur occasionnelle à la poitrine due à sa deuxième DSAC. Elle n’avait pas prévu le fardeau psychologique qui allait s’ensuivre. « Je suis retournée au service des urgences pour la troisième fois à la fin du mois de janvier 2025, parce que j’avais de nouveau des douleurs », confie-t-elle.
« Il est apparu que ma troponine était basse, mais ça affecte votre état d’esprit : est-ce que ça se déchire à nouveau? Est-ce que ça s’agrandit? Est-ce que c’est ceci, est-ce que c’est cela? Ça joue dans la tête, on se ronge d’inquiétude. »
Mme Lachance a repris avec bonheur ses fonctions de bénévole à Saint-Boniface. Elle s’occupe maintenant de l’inscription des patientes et des patients, qu’elle accompagne à leurs rendez-vous.
« En étant soi-même une patiente, on apprécie beaucoup plus le niveau de soins prodigués. Maintenant, si les patientes et les patients me racontent leur histoire en se rendant à l’Institut Asper ou à la clinique Bergen de soins cardiaques, je peux leur dire que je suis moi-même une patiente atteinte d’une maladie cardiaque. Je leur raconte à quel point j’ai été bien soignée, et je le suis encore, à Saint-Boniface. »
« Depuis plus de dix ans que je suis bénévole, les gens me disent combien ils apprécient les soins cardiaques offerts à Saint-Boniface, que ce soit à Asper, en chirurgie, à la clinique des stimulateurs cardiaques – à quel point tout le monde fait du bon travail. Les soins que j’ai reçus ont été absolument fantastiques », ajoute-t-elle.
« Je ne dirai jamais trop de bien des soins reçus, et je ne dis pas ça parce que je suis bénévole. Les aides-soignantes et aides-soignants, les infirmières et infirmiers et les médecins ont tous été extraordinaires. Je suis d’autant plus fière d’être bénévole à l’Hôpital Saint-Boniface. »