Henry Suarez s’est réveillé à l’Hôpital Saint-Boniface. Il était arrivé à Winnipeg et il avait survécu au transport en ambulance aérienne, ce qui était déjà un miracle.
Le Dr Jonathan Hong, chirurgien cardiaque au Département des sciences cardiaques de l’Hôpital, se tenait au-dessus de son lit avant l’opération.
« Il émanait du Dr Hong la confiance d’une personne qui connaît bien son travail. Je sentais cette confiance chez tout le monde dans la salle, ce qui m’a donné de l’espoir », se souvient M. Suarez, âgé de 48 ans. « Je n’avais pas peur à ce moment-là. »
Quelques heures plus tôt, il travaillait à son ordinateur chez lui, à Thunder Bay, en Ontario. C’était en mars 2025 et une tempête de neige soufflait dehors. Il ignorait alors que sa vie était sur le point de basculer en un instant.
« Tout a commencé par un gargouillis dans ma gorge. J’ai tout de suite senti une énorme vague de chaleur à partir de ma taille. En deux ou trois secondes, j’ai ressenti toutes les émotions connues de l’humanité, multipliées par 1 000. La peur, la nervosité et l’anxiété m’ont submergé. La panique s’est installée parce que je savais que quelque chose n’allait pas », se rappelle M. Suarez.
En quelques minutes, sa mâchoire s’est bloquée. Il a senti ses dents se serrer et il éprouvait une douleur intense à la mâchoire qui irradiait jusque dans ses oreilles
« J’avais l’impression qu’un dentiste m’avait arraché toutes les dents. Étourdi, je suis monté à l’étage avec la plus grande prudence et j’ai dit à ma femme, Carla, que quelque chose n’allait pas du tout. « Je crois que je suis en train de faire une crise cardiaque », lui a-t-il dit.
Le couple a décidé de composer le 911. « Dans ces moments-là, on ne sait pas quoi faire ensuite. Devais-je appeler mes enfants? Mon avocat? Paniqué, je me raccrochais au moindre espoir. »
Une ambulance a rapidement été dépêchée sur les lieux et a conduit M. Suarez au Centre régional des sciences de la santé de Thunder Bay.
À l’hôpital, les résultats d’un tomodensitogramme ont révélé qu’il avait une dissection aortique de type A selon la classification de Stanford et une dissection de type B. Le type A est le type de déchirure le plus courant, qui atteint la partie la plus proche du cœur. Il était plus dangereux que le type B (plus éloigné du cœur, vers l’abdomen), car il était plus susceptible de provoquer une rupture de l’aorte de M. Suarez. Le type A peut être très rapidement mortel.
L’ambiance est devenue morose. « On m’a dit de mettre de l’ordre dans mes affaires et d’appeler ma famille. Carla et moi avons dû nous préparer à la possibilité que je ne survive pas au vol d’ambulance aérienne. » M. Suarez a été transporté à l’Hôpital Saint-Boniface à Winnipeg, qui est un centre d’excellence en matière de santé cardiaque au Manitoba.
« Je remercie Dieu que le personnel ait traité ma femme et ma famille avec compassion. La touche personnelle est très importante. »
Les ambulanciers paramédicaux de Thunder Bay ont installé M. Suarez dans l’ambulance aérienne, qui a décollé sur-le-champ. Dans l’avion, M. Suarez a envoyé des textos à toutes les personnes possibles, à sa famille et à ses amis, pour leur dire au revoir. Il avait du mal à penser clairement.
« Ma propre santé ne me préoccupait pas autant que les cœurs brisés que j’allais laisser derrière moi. J’ai beaucoup pensé à mes enfants. Il était environ 3 heures du matin à ce moment-là; j’ai rapidement perdu le service cellulaire et je me suis assoupi », dit-il.
Sa femme Carla est restée à Thunder Bay parce qu’il n’y avait pas assez de place pour elle et leur fille sur le vol. Elle a dû patienter encore 12 heures avant de prendre un vol commercial pour Winnipeg, pendant que M. Suarez subissait une intervention chirurgicale.
« Je me souviens de m’être réveillé avant l’opération. Le Dr Hong m’a tendu mon cellulaire et j’ai parlé à Carla une dernière fois avant d’entrer dans la salle. Tout le monde était efficace et extrêmement professionnel tout en étant compatissant, calme, posé et confiant », ajoute-t-il.
La chirurgie, qui était complexe, a duré plus de 12 heures.
Le Dr Hong a sauvé la vie de M. Suarez en remplaçant l’anneau aortique par une valve mécanique et en effectuant un remplacement de l’arc de l’aorte. « Avec le recul, je me demande comment lui et son équipe ont pu travailler aussi longtemps. Qui peut faire ça sans trembler?! », se demande M. Suarez.
Par la suite, malgré son épuisement, le Dr Hong est allé parler à Carla, qui venait d’arriver à Winnipeg. « J’étais impressionné qu’il prenne le temps de s’entretenir avec elle », dit M. Suarez. « Je remercie Dieu que le personnel ait traité ma femme et ma famille avec compassion. La touche personnelle est très importante. »
« Tous les membres du personnel infirmier de l’Unité des soins intensifs (USI), à chaque changement de quart, connaissaient leur métier. Ils comprenaient tous ma situation; tout le monde était en contrôle. Le niveau de soins à l’Hôpital Saint-Boniface est exceptionnel, absolument incroyable. Carla et moi en parlons encore tous les jours. En ce qui concerne ma valve aortique et tout le travail exécuté par le Dr Hong, c’est une réussite. »
« Le personnel de l’USI a été honnête avec moi au sujet de mon rétablissement. Je peux encore mener une vie normale, mais je dois faire attention. Quand vous traversez une telle épreuve, vous avez parfois l’impression que votre vie est finie. Vous vous dites que vous ne serez plus jamais comme avant. Cependant, les soignants de l’Hôpital Saint-Boniface m’ont donné la confiance nécessaire pour aller de l’avant et m’ont fait comprendre que j’étais capable de le faire », dit-il.