Aller au cœur du problème

26 octobre 2023

Pour la chercheuse Inna Rabinovich-Nikitin, il s’agit d’une affaire personnelle

Son intérêt pour la question de la santé cardiaque des femmes est né d’une promesse qu’elle s’est faite à elle-même sur un lit d’hôpital. Depuis, c’est devenu l’œuvre de sa vie.

Il y a dix ans, alors qu’elle était enceinte de l’aînée de ses trois filles, Mme Rabinovich-Nikitin a développé une prééclampsie, une maladie dangereuse caractérisée par une hypertension artérielle. Son médecin l’a hospitalisée pendant six semaines par précaution.

« J’ai fait mon doctorat pendant ma grossesse », se souvient Mme Rabinovich-Nikitin, qui est chercheuse principale de l’Institut des sciences cardiovasculaires (ISC) à l’Hôpital Saint-Boniface et titulaire de la chaire de la famille Evelyn Wyrzykowski en sciences cardiovasculaires.

« En tant que scientifique, j’étais à la recherche d’ouvrages scientifiques pouvant expliquer ce que je vivais avec la prééclampsie et ce à quoi je pouvais m’attendre pour moi et mon bébé. »

Elle n’a pas trouvé les réponses qu’elle cherchait. « Il y avait très peu de publications à l’époque, dit-elle. C’est donc un objectif que je me suis fixé : mes recherches devaient porter sur ce domaine. »

Pour les femmes, les enjeux ne pourraient être plus importants. La prééclampsie concerne jusqu’à 10 % des grossesses et constitue l’une des principales causes de décès des femmes enceintes et de leurs fœtus dans le monde.

« Nous comprenons encore très mal la prééclampsie et les maladies liées à la grossesse, leurs effets sur le cœur et sur les générations futures, dit Mme Rabinovich-Nikitin. Nous devons réduire les risques pour les femmes, les fœtus et les bébés. »

La prééclampsie accroît également le risque de maladie cardiaque chez les mères plus tard dans la vie. « Nous avons tous dans notre entourage des femmes qui ont été ou seront exposées à un moment ou à un autre aux maladies cardiaques, fait remarquer Mme Rabinovich-Nikitin. Avec l’obésité et l’hypertension artérielle, le risque d’insuffisance cardiaque chez les femmes est plus élevé que chez les hommes. »

Étudier les effets des perturbations du sommeil sur la santé cardiaque des femmes
(De gauche à droite) Mme Inna Rabinovich-Nikitin et son équipe de chercheurs : Molly Crandall, Darya Nematisouldaragh, Eryn Kirshenbaum et Huong Nguyen.

Dans le cadre de ses recherches, Mme Rabinovich-Nikitin étudie aussi les effets du travail par quarts et des perturbations du sommeil sur la santé cardiaque des femmes.

Les perturbations du sommeil régulier et réparateur sont généralement plus importantes chez les femmes que chez les hommes, explique-t-elle. Cela est dû au fait que les femmes sont le plus souvent les premières à s’occuper des enfants en bas âge (pensez à l’allaitement). Les femmes représentent aussi un pourcentage important des travailleurs par quarts dans le monde.

Le manque de sommeil accroît le risque de maladie cardiaque de 40 % chez les deux sexes, affirme Mme Rabinovich-Nikitin.

« Nous savons déjà que la perturbation du sommeil a des effets néfastes sur le cœur, mais nous ne connaissons pas les effets particuliers sur les femmes en général ou sur des populations spécifiques, telles que les femmes enceintes, » dit-elle.

« Même dans ce domaine, bien que les femmes ne contribuent pas moins que les hommes au travail par quarts, toutes les recherches effectuées sur le travail par quart et les maladies cardiaques ont porté principalement sur les hommes. »

Le soutien des donateurs permet de jeter les bases de la connaissance

L’initiative de recherche sur la santé cardiaque des femmes à l’Hôpital Saint-Boniface ouvre de nouvelles perspectives passionnantes.

« Il y a tant de choses à découvrir, dit-elle. Depuis le lancement du programme il y a un an, nous avons fait des découvertes importantes. Nous savons que chaque petite contribution que nous apportons est importante, car il reste encore beaucoup à explorer. »

Dans le cadre de l’initiative de recherche sur la santé cardiaque des femmes, Mme Rabinovich-Nikitin et son équipe collaborent avec des médecins pour traduire leurs résultats en soins cliniques. Leurs travaux mènent à des changements aux politiques, à la promotion de choix de modes de vie et à de meilleurs traitements pour les femmes souffrant de maladies cardiaques.

« C’est très stimulant, car vous pouvez voir les résultats de votre travail en action immédiatement, » dit-elle.

« Je suis reconnaissante aux donateurs de la Fondation. Ils nous aident à jeter les bases de la connaissance et à poursuivre notre travail. La recherche exige énormément de ressources, et sans leur aide, elle ne serait pas réalisable. »

Le soutien des donateurs a permis à Mme Rabinovich-Nikitin et à l’ISC, en collaboration avec le RBC Youth BIOlab Jeunesse du Centre de recherche Albrechtsen de l’Hôpital Saint-Boniface, de mettre au point un nouveau programme sur la santé cardiaque des femmes à l’intention des élèves du secondaire au Manitoba. Elle dit que l’ISC lancera un cours semblable pour les étudiants de troisième cycle qui souhaitent étudier dans le domaine de la santé cardiaque des femmes.

Mme Rabinovich-Nikitin fera une présentation publique, intitulée « La santé cardiaque chez les femmes : il est temps de faire un bilan de santé », le 2 novembre 2023, à 14:15 h au Centre de recherche Albrechtsen de l’Hôpital Saint-Boniface. Sa présentation sera diffusée en direct et enregistrée pour être visionnée ultérieurement sur YouTube (@StBonifaceResearch).


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