Vous avez permis à Jennifer de revivre

Imaginez que vous vous réveillez un matin dans votre propre lit, mais que vous êtes incapable de vous rappeler où, ni même qui, vous êtes. Voilà le scénario troublant qu’a vécu Jennifer Lee, il y a dix ans.

« La personne que j’étais avant cette journée de 2009 n’existe plus, affirme Jennifer Lee. Mon cerveau ne fonctionne plus de la même façon. Il m’est impossible de redevenir la personne que j’étais auparavant. »

Vivant à Brandon à l’époque, Jennifer s’est réveillée en entendant des voix inconnues dans sa chambre. « J’avais vraiment peur. Je sais maintenant que je faisais une psychose, dit-elle. Pour une raison ou une autre, je me souvenais seulement de l’endroit où je travaillais. Donc, contre toute raison, je me suis levée et je suis partie travailler, malgré toute cette confusion dans ma tête! »

Ça ne s’est pas bien passé.

Comme elle agissait de manière erratique, on lui a demandé de partir peu après son arrivée au travail. « C’était presque comme si j’avais pris de la drogue. Ce n’était pas le cas, mais c’est ce que les gens devaient penser. » Jennifer Lee se souvient qu’elle avait l’impression que son corps était contrôlé par quelqu’un d’autre.

Ne sachant pas quoi faire, elle a réussi à retourner chez elle et s’est blottie dans son lit. « J’ai passé environ une semaine seule, essayant de me faire croire que ce qui se passait était irréel. Je ne savais pas ce qui m’arrivait. »

La famille de Jennifer et sa colocataire ont fini par se rendre compte que quelque chose n’allait pas et l’ont aidé à demander de l’aide dans un hôpital de Brandon. Elle a alors reçu un diagnostic de trouble bipolaire (qui a par la suite été changé pour celui de trouble schizoaffectif, son diagnostic actuel).

Ça faisait beaucoup de choses d’un seul coup. Au service psychiatrique de Brandon, en raison de sa maladie mentale, Jennifer Lee est devenue paranoïaque. Elle ne faisait confiance à personne et se méfiait beaucoup des médicaments antipsychotiques qu’on lui avait prescrits, croyant que c’était du poison. Elle sentait que sa vie était en danger.

Il y a eu aussi les voix. « Elles étaient imprévisibles, inconnues et me disaient constamment quoi faire, » dit-elle.

« Ces voix m’inquiétaient beaucoup; elles ne sont jamais parties. »

Au printemps 2012, Jennifer a quitté l’hôpital et a voulu redevenir autonome. Elle a cessé de prendre ses médicaments et s’est installée à Winnipeg.

Encore une fois, les choses ne se sont pas bien passées.

Après quelques mois, sa famille s’est encore une fois inquiétée de son comportement. « Les choses n’allaient pas bien pour moi en octobre, explique Jennifer. Je n’avais pas dormi depuis deux jours. » Quelqu’un a appelé la police et Jennifer a été admise à l’édifice McEwen de l’Hôpital Saint-Boniface, où sont fournis des services en santé mentale. Elle y a été admise deux fois cette année-là, pour des séjours de trois à quatre semaines.

Apprendre à aller de l’avant

« Lorsque je suis arrivée à l’édifice McEwen, je me suis immédiatement sentie mieux, dit-elle. On peut se sentir seule et isolée durant une hospitalisation, mais à cet endroit, je sentais que tout le monde s’occupait de moi. Je n’avais pas à m’inquiéter de ma maladie. Je sentais que l’on s’occupait de moi. »

Néanmoins, Jennifer avait toujours peur d’être empoisonnée par sa médication. « Toutefois, on m’a expliqué les choses d’une façon que je comprenais. Pour la première fois, je pouvais espérer que les choses allaient mieux aller pour moi. On m’a expliqué pourquoi des médicaments m’étaient prescrits et comment ils agissaient comparativement à d’autres médicaments. Tout le personnel de l’Hôpital Saint-Boniface a été franc avec moi. Si j’avais une question, j’obtenais une réponse », dit-elle.

À l’édifice McEwen, Jennifer Lee a trouvé un système de soutien et un sentiment d’appartenance qui l’ont aidé à se concentrer sur les aspects positifs de son rétablissement, plutôt que sur la négativité associée à la maladie mentale. « J’ai appris à connaître d’autres patients de l’édifice McEwen. Pour mon 30e anniversaire de naissance, le personnel infirmier a apporté des petits gâteaux pour que tout le monde puisse fêter. Lorsque c’est l’anniversaire d’un patient, le personnel le souligne. C’est quelque chose de positif pour tout le monde; ça nous aide à nous concentrer sur quelque chose d’agréable. »

« Une grande partie du traitement consiste à apprendre à faire confiance, explique-t-elle. Toutes les personnes que j’ai rencontrées et qui se sont occupées de moi ont été attentionnées, gentilles, ouvertes et franches avec moi. Ça aide, parce que j’ai ainsi envie de continuer mon traitement. »

Les choses vont enfin bien.

Dix ans ont passé depuis le début de la maladie mentale de Jennifer. Aujourd’hui, elle continue de vivre de façon indépendante à Winnipeg. « J’ai eu différents emplois au fils des ans. C’est difficile de bien faire son travail quand on entend des voix, dit-elle. J’ai dû quitter certains emplois parce que j’entendais des voix. Lorsque les gens me parlent, j’entends aussi des voix. C’est difficile de me concentrer et d’écouter quand différentes voix me parlent. »

« Je ne peux qu’aller mieux, dit-elle. Ma vie s’améliore constamment. Je suis très optimiste. Je préfère regarder vers l’avenir plutôt que vers le passé. »


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